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pharmaco-medicale

Site du Collège National de Pharmacologie Médicale

Médicaments de la DMLA

Résumé de la fiche

La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est une maladie dégénérative rétinienne chronique, évolutive et invalidante, qui débute après l’âge de 50 ans.
Il s’agit de la 1ère cause de malvoyance chez les plus de 50 ans dans les pays développés.

Concernant la DMLA exsudative (dite « humide », représentant 20% des formes cliniques de DMLA), les traitements médicamenteux existants inhibent la voie du Vascular Endothelial Growth Factor (VEGF) : ranibizumab, bevacizumab, aflibercept, brolucizumab.

Concernant la DMLA atrophique, aucun traitement médicamenteux n’est disponible actuellement en France. Un inhibiteur du complément (le pegcetacoplan) semblerait ralentir la progression de l’atrophie et a été autorisé aux Etats-Unis en 2023.

Les traitements existants s’administrent par voie intravitréenne. Leurs contre-indications, effets cliniques utiles et effets indésirables découlent de la voie d'administration utilisée (risque d’hémorragie sous-conjonctivale, d’hypertonie intra-oculaire, d’infection) et de leur classe pharmacologique (inhibition du VEGF).

Item(s) ECN

81 (Altération chronique de la vision), 82 (Altération aiguë de la vision)

Rappel physiopathologique

La dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) est une maladie dégénérative rétinienne chronique, évolutive et invalidante, qui débute après l’âge de 50 ans. 

Il s’agit de la 1ère cause de malvoyance chez les plus de 50 ans dans les pays développés. La prévalence augmente avec l'âge : la forme tardive de la DMLA se rencontre chez 0,3% des sujets avant 64 ans, 2% des 65-74 ans et 6% des plus de 75 ans en Europe (Li et al., British Journal of Ophthalmology 2020).
Il s’agit d’une pathologie multifactorielle. Plusieurs facteurs de risque sont décrits : l'âge, des facteurs génétiques, le tabagisme et des facteurs nutritionnels.

La DMLA atteint les cellules de la rétine externe (photorécepteurs, épithélium pigmentaire) au niveau de la macula. Leur destruction conduit à une baisse d’acuité visuelle (BAV), à l’apparition d’un scotome central et de métamorphopsies (déformations des images).  


On décrit 3 formes :
- une forme précoce (environ 40% des cas), caractérisée par la présence de drusen. On parle de la maculopathie liée à l’âge (MLA).
- deux formes tardives. On parle de DMLA "symptomatique" ou "évoluée".
     - une forme atrophique (environ 40% des cas), également appelée "forme sèche", d'évolution lente sur plusieurs années, caractérisée par des altérations de l’épithélium pigmentaire et un amincissement de la macula consécutif à l’évolution des drusen (dépôts jaunâtres qui s’accumulent dans la rétine externe)
     - une forme exsudative (environ 20% des cas), également appelée "forme humide", caractérisée par le développement de néovaisseaux d’origine choroïdienne, d’évolution souvent rapide, pouvant conduire à une BAV majeure en quelques semaines ou quelques mois. La survenue brutale de BAV, métamorphopsies et/ou scotome central justifient un examen ophtalmologique en urgence pour permettre un diagnostic et un traitement rapide.

Médicaments existants

Dans la forme précoce (MLA), la prise orale de vitamines "antioxydantes" (C, E), de minéraux (zinc, cuivre), d’oméga-3 et de caroténoïdes (lutéine, zéaxanthine) semblent ralentir la progression vers la forme tardive. Il est conseillé au patient un régime alimentaire équilibré, riche en légumes, poissons et huile d'olive.

Dans la forme atrophique, aucun traitement médicamenteux n’est disponible actuellement en France. Un inhibiteur du complément, administré en injection intra-vitréenne, semble ralentir la progression de l’atrophie, et a été autorisé aux Etats-Unis.Dans la forme exsudative, les inhibiteurs du Vascular Endothelial Growth Factor (VEGF), administrés par voie intra-vitréenne, représentent le traitement de première intention.

Plusieurs molécules existent : le ranibizumab, l’aflibercept, le bevacizumab (en prescription hospitalière).
La thérapie photodynamique (PDT ou PhotoDynamic Therapy) est indiquée uniquement dans certains cas, en deuxième intention. Elle utilise l'injection de vertéporfine (substance photosensibilisante se fixant électivement sur les parois des néovaisseaux) suivie d'une photo-irradiation avec un laser infrarouge.


Tableau : Médicaments inhibant la voie du VEGF

DCI Indication AMM ou RTU Posologie  SMR / ASMR 
 ranibizumab

 - DMLA, forme néovasculaire
 - oedème maculaire diabétique (OMD), rétinopathie diabétique proliférante 
 - oedème maculaire secondaire à une occlusion de la veine de la rétine (centrale ou branche, OVCR ou OBVR)
 - néovascularisation choroidienne (NVC, secondaire par exemple à une myopie forte) 

- rétinopathie du prématuré (ROP)

 0,5 mg (0,05 mL) en injections intravitréennes, espacées d'au moins 4 semaines

SMR - Important dans DMLA, OMD, OVCR, OBVR, NVC

SMR - Insuffisant dans ROP

ASMR - V dans OMD
ASMR - IV dans OVCR, OBVR, NVC
ASMR - III dans la NVC myopique 

ASMR - II dans la DMLA

bevacizumab  - DMLA, forme néovasculaire (RTU 2015)
 - indications oncologiques (formes métastatiques/avancées de cancers colorectaux, du sein, bronchiques non à petites cellules, rein, ovaire/trompes, péritonéal, col utérin)
 1,25 mg (0,05 mL) en injections intravitréennes, espacées d'au moins 4 semaines  SMR - non précisé dans la DMLA
 aflibercept

 - DMLA, forme néovasculaire
 - oedème maculaire diabétique (OMD)
 - oedème maculaire secondaire à une occlusion de la veine de la rétine (centrale ou branche, OVCR ou OBVR)
 - néovascularisation choroidienne (NVC) myopique

 2 mg (0,05 mL) en injections intravitréennes, espacées d'au moins 1 mois

 SMR - Important dans toutes ses indications

 ASMR - V dans DMLA et OVCR
 ASMR - IV dans OMD, OBVR
 ASMR - III dans NVC myopique

anti VEGF DMLA v5 

Thérapie Photodynamique - Verteporfine:
- indiquée dans la NVC rétro-fovéolaire de la DMLA ou myopique;
- administrée par voie intraveineuse stricte, à la posologie de 6 mg/m² en perfusion de 10 minutes, suivie d'une PDT (photothérapie dynamique);
- SMR : important. ASMR: III.

Mécanismes d’action des différentes molécules

Le mécanisme d'action des différents médicaments passe par leur fixation au VEGF (VEGF-A essentiellement), l'empêchant de se fixer sur son récepteur, conduisant à l'inhibition de la néoangiogenèse.

anti VEGF DMLA v4

La vertéporfine est un dérivé benzoporphyrine. C'est un agent photosensibilisant (médicament activé par la lumière). 

La vertéporfine n'est pas en elle-même cytotoxique; elle engendre des agents cytotoxiques uniquement après son activation par la lumière en présence d'oxygène. Lorsque l'énergie absorbée par la porphyrine est transférée à l'oxygène, un singulet d'oxygène transitoire et hautement réactif est généré, entraînant des lésions au niveau des structures biologiques, conduisant à une occlusion vasculaire locale, des lésions cellulaires et, dans certaines conditions, la mort cellulaire. La sélectivité de la PDT avec la vertéporfine est basée, outre l'exposition lumineuse localisée au niveau de l'oeil, sur le captage sélectif et la rétention de la vertéporfine par les cellules à prolifération rapide, en particulier l'endothélium des néovaisseaux choroïdiens.

Effets utiles en clinique

L'inhibition de la néovascularisation conduit aux effets cliniques utiles: 
- amélioration de l'acuité visuelle
- amélioration des critères anatomiques (diminution de l'épaisseur maculaire, régression de l'oedème maculaire)

Caractéristiques pharmacocinétiques utiles en clinique

Après administration intra-vitréennes la demi-vie (intra-vitréenne) a été estimée à environ une dizaine de jours pour le ranibizumab, l'aflibercept et le bevacizumab. 
Il existe un passage systémique (faible toutefois) des médicaments administrés par voie intravitréenne, avec (aux posologies préconisées) une exposition systémique plus importante pour le bévacizumab (demi-vie systémique de 21 jours) > aflibercept (18 jours) > brolucizumab (4 jours) ranibizumab (2 heures) . 
Enfin, l'inhibition du VEGF systémique a été plus importante après injection intravitréenne d'aflibercept comparativement au bevacizumab et ranibizumab.
Finalement, ces caractéristiques pharmacocinétiques sont à mettre en parallèle avec la structure des différents anti-VEGF: anticorps monoclonal complet (bevacizumab), Fab (ranibizumab), protéine de fusion (aflibercept).
(source: Avery R et al. Retina 2017; Christoforidis JB et al. Invest Ophthalmol Vis Sci 2017; Avery R et al. B J Opthalmol 2014; rapport SFO 2016)

La demi-vie d'élimination plasmatique de la vertéporfine est d'environ 5 à 6 heures, son excrétion étant principalement biliaire, majoritairement sous forme inchangée.

Situations à risque ou déconseillées

Les contre-indications aux injections intravitréennes d'anti-VEGF sont liées à l'injection elle même et aux effets des médicaments : infection ou inflammation oculaire. La grossesse est également une contre-indication absolue pour le bevacizumab du fait du risque de passage systémique des anti-VEGF (pour les autres molécules cf précautions d'emploi). 

Les contre-indications aux injections de vertéporfine, outre l'hypersensibilité, sont les porphyries et l'insuffisance hépatique sévère.

Précautions d’emploi

Les principales précautions d'emploi des anti-VEGF sont :
- l'utilisation en association avec un autre anti-VEGF (systémique ou oculaire) : non recommandé
- l'utilisation chez patients présentant des facteurs de risque de ou une déchirure de l'épithélium pigmentaire rétinien : prudence ou non recommandé
- l'utilisation chez les femmes enceintes, à moins que "le bénéfice prévisible pour la mère l'emporte sur le risque potentiel pour le foetus"
- l'utilisation chez les patients à haut risque cardiovasculaire

Les principales précautions d'emploi de la vertéporfine sont:
- le risque de photosensibilité lors de l'exposition à la lumière persistant pendant 48 heures après la perfusion : protection (lunettes haute protection, vêtements; attention: les crèmes solaires ne sont pas efficaces)
- prévention du risque d'extravasation pouvant conduire à une douleur, inflammation, oedème, changement de coloration
- réaction d'hypersensibilité pouvant être sévère, nécessitant donc une surveillance étroite du patient

Effets indésirables

Les effets indésirables des anti-VEGF par voie intraoculaire sont
- principalement des effets oculaires :
   - effets graves : perte de la vision (cécité), endophtalmie, décollement de rétine, hémorragie vitréenne, décollement du vitré, augmentation de la pression intraoculaire, cataracte traumatique;
   - autres effets : hémorragie conjonctivale, douleur, baisse de l'AV...
- plus rarement et controversé : il semblerait y avoir un très minime surrisque d'événements thrombo-emboliques ou hémorragiques systémiques après IVT d'anti-VEGF. L' IVT d'anti-VEGF est alors à discuter au cas par cas, surtout chez les patients ayant présenté un événement cardio-vasculaire récent. 

Le risque de survenue de ces effets indésirables nécessite donc une surveillance clinique ophtalmologique et générale des patients bénéficiant d'injections intravitréennes d'anti-VEGF. Le contrôle des facteurs de risque cardiovasculaire est souhaitable. 

Les principaux effets indésirables de la vertéporfine sont : les réactions au site de perfusion surtout en cas d'extravasation et les effets indésirables oculaires: vision trouble, photopsie, baisse de l'AV, altérations du champ visuel. Le risque d'hypersensibilité lors de la perfusion (sensation de malaise, rash/urticaire, prurit, bouffée vasomotrice, altération de la pression artérielle et/ou de la fréquence cardiaque, convulsion). De rares événements cardiovasculaires (infarctus du myocarde) ont été rapportés.

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  • Dernière modification: : Inès Ben Ghezala
  • 11 mai 2023