Benzamides
Résumé de la fiche
L'amisulpride, le sulpiride, et le tiapride représentent aujourd'hui les antipsychotiques de la classe des benzamides substitués.
Sur le plan pharmacologique, ces molécules se caractérisent par leur liaison élective sur les récepteurs dopaminergiques des sous-types D2/D3, qu’elles bloquent, une localisation des effets plus limbique que striatale et une action bipolaire, prédominante sur les autorécepteurs présynaptiques à faible dose mais sur les récepteurs postsynaptiques à fortes doses.
Comme tous les antipsychotiques, les effets utiles en clinique concernent principalement les psychoses schizophréniques à manifestations positives (fortes doses) ou négatives (faibles doses). Les benzamides ont aussi été considérés comme efficaces dans les dysthymies (faibles doses).
Ces molécules ne subissent pas de métabolisation et sont éliminées majoritairement par la voie urinaire. Les effets indésirables qu'elles peuvent induire sont ceux de leur classe avec toutefois une moindre incidence des effets extrapyramidaux.
Item(s) ECN
61 : Trouble schizophrénique de l’adolescent et de l’adulte72 : Prescription et surveillance des psychotropes
326 : Prescription et surveillance des classes de médicaments les plus courantes chez l'adulte et chez l'enfant
Médicaments existants
Trois molécules antipsychotiques appartenant à la classe chimique des benzamides dites substitués sont actuellement commercialisées : l'amisulpride (AMM 1986), le sulpiride (AMM 1968), et le tiapride (AMM 1974).
Le remoxipride et le raclopride appartiennent également à cette classe, mais ne sont pas disponibles en tant que médicament (le métoclopramide, un antiémétique, est aussi un benzamide substitué).
L’amisulpride, le tiapride et le sulpiride sont commercialisés sous des formes galéniques destinées à l’administration orale (comprimés, solution buvable) ou à l’injection intramusculaire ou intraveineuse (tiapride).
Mécanismes d’action des différentes molécules
Les benzamides substitués se lient majoritairement aux récepteurs dopaminergiques D2 et D3 avec une certaine sélectivité pour les voies mésolimbiques, localisation préferentielle des récepteurs D3.
Leur action est bipolaire, à faible dose le blocage des récepteurs présynaptiques serait majoritaire et, à forte dose, l'effet s'exercerait sur les récepteurs postsynaptiques.
Amisulpride : affinité des récepteurs
+++ : D3, D2
++ : 5-HT2B, 5-HT7
Sulpiride : affinité des récepteurs
++ : D3, D4, D2
Effets utiles en clinique
Comme tous les antipsychotiques, les benzamides substitués sont indiqués dans le traitement des psychoses, dont la schizophrénie tant avec prédominance des signes positifs que négatifs (à plus faible posologie).
A faible dose, leur action dopaminergique mésolimbique pourrait aussi être utile dans les dépressions et dysthymies (en Italie, l'amisulpride a été d'abord enregistré sur la seule indication de dysthymie).
Le profil de tolérance et le faible risque d'interactions médicamenteuses font prescrire ces molécules, en particulier le tiapride, dans les troubles du comportement de la sénescence. Le tiapride est également indiqué dans les chorées et la maladie des tics de Gilles de la Tourette. Il est autorisé chez l'enfant à partir de 3 ans, pour le traitement des troubles graves du comportement avec agitation et agressivité. Le tiapride est également indiqué dans la prise en charge des algies intenses et rebelles.
Pharmacodynamie des effets utiles en clinique
Dans les épisodes psychotiques aigus, et pour les molécules dont une forme injectable est disponible, il est possible de commencer le traitement par la voie intra-musculaire avant de prendre le relais par la voie orale.
Caractéristiques pharmacocinétiques utiles en clinique
Ces molécules sont caractérisées par une faible liaison aux protéines, une quasi absence de métabolisation (ce qui restreint leur potentiel d'interactions cinétiques) et une élimination essentiellement urinaire. Leur passage de la barrière hématoencéphalique est médiocre.
Le sulpiride et le tiapride sont excrétés dans le lait.
Les paramètres figurant dans le tableau suivant correspondent à une administration par la voie orale.
|
Amisulpride |
Sulpiride |
Tiapride |
Biodisponibilité |
43-48 % modifiée par l’alimentation |
25-35 % |
75 % modifiée par l’alimentation |
tmax |
1 h puis 3 à 4 h |
3-6 h |
1 h |
Liaison aux protéines |
16 % |
< 40 % |
Absence |
Volume de distribution |
5,8 L/kg |
0,94 L/kg |
1,43 L/kg |
Demi-vie |
12 h |
8-9 h |
3-4 h |
Métabolisme |
Négligeable |
Négligeable |
Négligeable |
Elimination |
Urine + fèces |
Urine + fèces |
Urine |
Source de la variabilité de la réponse
Intéractions médicamenteuses:
- Pharmacodynamique : il existe un antagonisme réciproque avec tous les agonistes dopaminergiques, directs ou indirects et l’association avec les agonistes dopaminergiques est une contre-indication. Ces molécules ne doivent pas être associées à d'autres médicaments susceptibles d'induire des arythmies ou pouvant favoriser leur survenue, notamment bradycardisants et hypokaliémants.
- Pharmacocinétique : l'absence de métabolisme par les cytochromes P450 et la faible liaison aux protéines ne sont pas en faveur d'interactions.
Réponse des populations physiologiques particulières:
Chez le sujet âgé les risque d'hypotension et de sédation sont accrus.
Réponse des populations pathologiques particulières:
L'élimination étant majoritairement rénale une réduction de dose doit être prévue en cas d'insuffisance rénale.
Le sulpiride est contre-indiqué chez les patients atteints de porphyrie (effet porphyrinogène démontré in vitro).
Situations à risque ou déconseillées
Comme pour tout médicament, la prescription de benzamides substitués est contre-indiquée en cas d'hypersensibilité à ces substances. Le phéochromocytome est une contre-indication à la prescription de ces molécules (risque majoré d'hypertension).
La connaissance ou la suspicion d’une tumeur prolactino-dépendante contre-indique également leur utilisation.
Précautions d’emploi
Il est conseillé d'éviter d'associer l'amisulpride avec les médicaments susceptibles de majorer le risque de troubles du rythme de type torsades de pointes et d'éviter de les prescrire chez les malades présentant des troubles du rythme cardiaque.
Il est recommandé d'effectuer un EEG dans le bilan initial des patients.
La consommation d’alcool est fortement déconseillée.
Effets indésirables
La moindre incidence des effets extrapyramidaux, par rapport aux molécules plus anciennes, et les données de l'expérimentation animale (absence de catalepsie), ont conduit à considérer les benzamides substitués comme des antipsychotiques atypiques avant l'heure.
Il n'y a pas de modification des enzymes hépatiques ni de la formule sanguine.
Nature de l'effet indésirable |
Gravité |
Estimation de la fréquence |
En savoir plus |
Neurologique |
|||
Effets extrapyramidaux : akathisie, akinésie, parkinsonisme, dyskinésies tardives |
Grave |
Fréquent |
Blocage des récepteurs D2 de la voie nigrostriée, dose-dépendant |
Endocrinien |
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Dysfonctionnement sexuel, galactorhée, aménorrhée |
Modérée |
Fréquent |
Blocage des récepteurs D2 de la voie tubéroinfundibulaire : élévation de la prolactine ; effet dose-dépendant |
Prise de poids |
Modérée |
Fréquent |
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Psychiatrique |
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Insomnie |
Modérée |
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Agitation |
Modérée |
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Anxiété |
Modérée |
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Cardiaque |
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Allongement du QT, arythmies ventriculaires, bradycardie |
Grave |
Surveillance des effets
La surveillance du traitement doit être renforcée chez les sujets épileptiques (abaissement du seuil épileptogène).