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pharmaco-medicale

Site du Collège National de Pharmacologie Médicale

*Hypnotiques : Les points essentiels

Résumé de la fiche

Les troubles du sommeil sont un symptôme fréquent qui nécessite préalablement à toute prescription médicamenteuse un bilan étiologique visant écarter toute pathologie organique ou psychiatrique qui relève d’autres traitements et qui pourrait s’aggraver sous hypnotiques.

Dans les troubles isolés du sommeil on distingue les troubles de l’endormissement - fréquents et souvent temporaires - des troubles du maintien et/ou de la qualité du sommeil. L’un comme l’autre sont souvent associés à une symptomatologie anxieuse, un conditionnement négatif par rapport au sommeil et une aggravation avec l’âge.

On appelle hypnotique toute substance capable d'induire et/ou de maintenir le sommeil.

Les hypnotiques actuellement disponibles ont en commun une action inhibitrice sur le système nerveux central qui, selon la dose utilisée, entraîne un effet sédatif, le sommeil narcotique ou un coma. Les benzodiazépines et apparentés qui agissent au niveau des récepteurs du système GABA-A sont les plus utilisés. Ces molécules entraînent une modification des paramètres du sommeil (délai d’endormissement, durée de différents stades). Cet effet hypnotique est soumis à une tolérance rapide puisqu’elle s’atténue en quelques jours expliquant leur perte d’efficacité après quelques semaines. Cet échappement thérapeutique est grandement responsable de leur surconsommation, d’autant que toute tentative d’arrêt mal conduit (brutal et sans prévenir des difficultés temporaires) aboutit à un échec avec anxiété et rebond d’insomnie.

Les hypnotiques sont rapidement résorbés par voie orale et leur métabolisme principalement hépatique. Leurs associations avec l'alcool et des substances dépressives du SNC sont à proscrire. Leur utilisation chez des populations à risque (sujet âgé, femme enceinte, enfants, insuffisance rénale, insuffisance hépatique, myasthénie) doit être prudente.

Un effet secondaire fréquent des hypnotiques consiste en une sédation résiduelle diurne quand la posologie et/ou la pharmacocinétique de l’hypnotique est mal adaptée. Les autres effets secondaires habituels des benzodiazépines (amnésie, troubles du comportement..) peuvent également survenir si le sujet ne se couche pas ou ne s’endort pas immédiatement. Un rebond d’insomnie peut survenir si l’arrêt du traitement est brutal.

Lors d’un traitement prolongé, une pharmacodépendance peut s'installer et se manifeste par un syndrome de sevrage lors de l'arrêt brutal du traitement.


Dans tous les cas, la prise doit avoir lieu immédiatement avant le coucher, leur prescription doit être aussi brève que possible et doit être limitée dans le temps (4 semaines maximum), associée à des règles d'hygiène (activité physique durant la journée, éviter les boissons excitantes par exemple).

Item(s) ECN

72 : Prescription et surveillance des psychotropes
75 : Addiction aux médicaments psychotropes (benzodiazépines et apparentés)
108 : Troubles du sommeil de l'enfant et de l'adulte
319 : La décision thérapeutique personnalisée : bon usage dans des situations à risque
322 : Identification et gestion des risques liés aux médicaments et aux biomatériaux, risque iatrogène, erreur médicamenteuse
326 : Prescription et surveillance des classes de médicaments les plus courantes chez l’adulte et chez l’enfant

Rappel physiopathologique

L’insomnie est un symptôme fréquent de consultation. Elle peut être définie par une altération du sommeil dans sa continuité et son architecture entraînant une privation de sommeil (ou un défaut de qualité) ayant des conséquences sur la vie diurne. L’insomnie est habituellement définie selon différents critères parmi lesquels son moment de survenue au cours de la nuit, son évolution (occasionnelle, transitoire ou chronique) et l’intensité de la plainte).

L’interrogatoire est un élément déterminant dans sa prise en charge permettant de rechercher l’existence de signes associés. Ceci permet de différencier l’insomnie isolée ou celle qui s’intègre dans le cadre d’une pathologie somatique (syndrome d’apnée du sommeil, syndrome des jambes sans repos, maladie de Parkinson) ou psychiatrique (troubles anxieux, dépression, début de psychose, toxicomanie par exemple). Ainsi la recherche d’une étiologie est un préalable indispensable à l’instauration d’un traitement.

Une nuit de sommeil se déroule habituellement en phases alternantes (4 en moyenne), de profondeur (seuil d’éveil) et d’activité electroencéphalographique (EEG) différentes (stade 1 à 4, avec le sommeil paradoxal où l’activité EEG et les rêves s’associent à une résolution musculaire).

Les principaux troubles du sommeil sont une difficulté d’endormissement, des éveils fréquents et prolongés, un réveil précoce, une durée totale du sommeil inadéquate, une qualité médiocre du sommeil reflétée par un retentissement diurne avec altération de la vigilance (diminution de l’énergie, diminution des fonctions cognitives, altération de l’état comportemental et émotionnel). La neurobiologie du cycle veille-sommeil n’est actuellement pas encore clairement élucidée, l’alternance harmonieuse des différents états de vigilance dépendant de nombreuses interactions complexes entre de multiples facteurs.

Il semble néanmoins que 4 familles de neurotransmetteurs soient particulièrement impliqués (le GABA, les catécholamines [noradrénaline surtout mais aussi dopamine et adrénaline], l’acétylcholine et la sérotonine). Les rythmes circadiens et en particulier ceux des hormones de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (dont le cortisol) jouent aussi un rôle important dans le déclenchement et le maintien du sommeil.

Médicaments existants

Les benzodiazépines (estazolam, loprazolam, lormetazépam, nitrazépam, témazépam) et les apparentés (imidazopyridines : zolpidem, cyclopyrrolones: zopiclone) sont les plus utilisées.

Les antihistaminiques H1 sont de possibles alternatives (doxylamine, niaprizine, alimémazine, prométhazine).

De nombreux autres médicaments psychotropes (neuroleptiques, tranquillisants, antidépresseurs) ont un effet sur le maintien ou l'induction du sommeil.

Mécanismes d’action des différentes molécules

Les différents produits disponibles agissent au niveau des récepteurs GABA (Benzodiazépines, zolpidem, zopiclone) ou au niveau des récepteurs à l’histamine H1 (Antihistaminiques H1).

Effets utiles en clinique

Les insomnies primitives ou isolées s’accompagnent d’un excès relatif de vigilance (activation des systèmes d’éveil) en rapport avec une composante anxieuse et/ou un conditionnement négatif par rapport au sommeil. Ainsi, les effets anxiolytiques et sédatifs des BZD et apparentés en font des médicaments intéressants pour un traitement symptomatique temporaire.

Les hypnotiques sont préconisés dans :

- l’insomnie occasionnelle.

- l’insomnie transitoire

- l’insomnie chronique

Le traitement des troubles du sommeil ne se limite pas à la simple prescription d’un hypnotique. Il est établi qu’au terme d’une démarche diagnostique et étiologique précise. Si la prescription d’un hypnotique est retenue, elle doit s’inscrire dans une prise en charge globale incluant notamment les conseils d’hygiène (activité physique durant la journée, éviter les boissons excitantes par exemple).

Pharmacodynamie des effets utiles en clinique

Les hypnotiques disponibles modifient de façon plus ou moins importante l’architecture du sommeil.

Le profil pharmacodynamique des médicaments hypnotiques est loin d’être sélectif et explique que ces substances entraînent également des effets latéraux dont l’intensité sera variable selon les sujets.

En effet, au coté de cet effet sédatif, les benzodiazépines et apparentés possèdent d’autres propriétés pharmacologiques communes : anxiolytique, amnésiante, myorelaxante, anticonvulsivante, et orexigène.


Les effets des médicaments antihistaminiques sur les différents paramètres du sommeil ont été peu étudiés en raison de l’ancienneté d’un grand nombre de ces molécules, utilisés davantage dans l’allergie que dans l’insomnie.

Caractéristiques pharmacocinétiques utiles en clinique

La pharmacocinétique des benzodiazépines se caractérise par une bonne biodisponibilité par voie orale, une bonne distribution en particulier du fait de leur importante lipophilie. La demi-vie plasmatique est variable. Certaines molécules benzodiazépiniques donnent naissance, par métabolisation hépatique, à des métabolites inactifs et actifs dont la demi-vie d'élimination est variable et peut être plus importante que la molécule mère. Cette caractéristique importante doit être prise en compte lors de l’utilisation de ces produits.


Les propriétés pharmacodynamiques des BZD étant commune à toute la famille des agonistes GABA-A, c’est essentiellement par des variations de vitesse d’élimination que les BZD et apparentées ont plutôt un profil d’activité de type hypnotique ( T1/2 courtes : loprazolam , zolpidem) que de type anxiolytique (T1/2 longues : desméthyl-diazépam, clorazépate, que l’on classe dans les anxiolytiques).

Source de la variabilité de la réponse

Plusieurs facteurs peuvent influencer les effets des hypnotiques. Ainsi toutes ces substances sont susceptibles de potentialiser les effets dépresseurs centraux d’autres substances notamment l’alcool et d’autres médicaments (antidépresseurs, antihistaminiques sédatifs, barbituriques, clonidine, hypnotiques, dérives morphiniques, neuroleptiques).

Chez le sujet de plus de 65 ans, il est recommandé de diminuer la posologie des benzodiazépines et apparentés, car leur demi-vie s'allonge de manière progressive et homogène, exposant les patients à des risques d’accumulation et de surdosage si la fréquence des prises et la dose ne sont pas réduites par rapport à celle administrée à l‘adulte plus jeune.

Les insuffisants respiratoires sévères sont particulièrement sensibles aux effets dépresseurs respiratoires des benzodiazépines et apparentés, expliquant la contre-indication des produits sur ce terrain.

Chez l’insuffisant hépatique non sévère (augmentation des demi-vies d'élimination de produits actifs ou de dérivés actifs), il est nécessaire de réduire la posologie pour limiter le risque de survenue d’encéphalopathie.

Situations à risque ou déconseillées

Les benzodiazépines et apparentés sont contre-indiqués chez les sujets présentant une insuffisance respiratoire sévère, un syndrome d’apnée du sommeil, une insuffisance hépatique sévère, une myasthénie. En cas d’antécédents connus de sensibilisation au produit, ces substances seront à proscrire. Les antihistaminiques H1, du fait de leurs effets antimuscariniques, sont contre-indiqués chez les patients ayant un glaucome à angle fermé ainsi que ceux présentant des troubles urétro-prostatiques (risque de rétention urinaire).

Précautions d’emploi

La durée globale du traitement ne doit pas excéder en général 4 semaines, y compris la période de réduction de la posologie, nécessaire pour éviter un rebond d’insomnie et la survenue d'une dépendance physique ou psychique avec ces substances.

Il est aussi préconisée d’instaurer un contrat thérapeutique avec les patients les plus à risque (antécédents d’alcoolisme ou autres dépendances).

En pratique, il faut établir avec le patient, dès la première prescription, les modalités d’arrêt du traitement.

Les conducteurs de véhicules et utilisateurs de machines doivent être informés et sensibilisés au risque possible de somnolence, aux conséquences potentiellement dramatiques.

L’absorption de boissons alcoolisées est formellement déconseillée au cours du traitement.
La prise doit avoir lieu immédiatement avant le coucher afin d’éviter la survenue d’effets secondaires.

Effets indésirables

Les principaux effets secondaires des hypnotiques sont résumés dans le tableau ci-dessous.

Type d’effets indésirables

Mécanisme en cause

Classe médicamenteuse en cause

Sédation

GABA

Récepteurs H1

Benzodiazépine et apparentés

Antihistaminique H1

Somnolence

GABA

Récepteurs H1

Benzodiazépine et apparentés

Antihistaminique H1

Amnésie

GABA

Benzodiazépine et apparentés

Pharmacodépendance

GABA

Benzodiazépine et apparentés Méprobamate

Troubles de la coordination

Vertiges

GABA

Anticholinergie

Benzodiazépine et apparentés

Antihistaminique H1

Constipation, dysurie

troubles de l’accommodation

Anticholinergie

Antihistaminique H1

Surveillance des effets

Le suivi du patient repose sur l'interrogatoire qui permettra de déceler :

- L'apparition de l'effet recherché avec disparition de l'insomnie après avoir vérifié l'observance

- Les modalités de prise de l’hypnotique : juste avant le coucher

- La survenue des effets indésirables avec notamment la recherche d’effets résiduels au réveil et dans la journée
- L’intérêt ou non de la poursuite du traitement.Les éventuels risques de mésusage ou de conduite addictive avec les BZD et apparentés

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  • 31 mai 2017