Antisérotoninergiques
Résumé de la fiche
On rassemble dans ce groupe divers médicaments ayant en commun une affinité importante pour les récepteurs 5HT2 de la sérotonine qui pourrait expliquer leur effet dans le traitement de fond de la migraine. L’oxétorone et le pizotifène dérivent des antidépresseurs tricycliques et, comme l’amitryptiline (également utilisée dans le traitement de fond de la migraine), ils possèdent des propriétés latérales atropiniques à l’origine d’effets indésirables et de contre-indications voisines. Tous ces médicaments partagent des effets indésirables fréquents à type de sédation imposant une prise vespérale et un effet orexigène parfois responsable de prise de poids importante.
Item(s) ECN
62 : Trouble bipolaire de l’adolescent et de l’adulte64 : Diagnostiquer : un trouble dépressif, un trouble anxieux généralisé, un trouble panique, un trouble phobique, un trouble obsessionnel compulsif, un état de stress post – traumatique, un trouble de l’adaptation (de l’enfant à la personne âgée), un tro
326 : Prescription et surveillance des classes de médicaments les plus courantes chez l’adulte et chez l’enfant
Médicaments existants
Fumarate d'oxétorone Nocertone®
Pizotifène Sanmigran ®
Amitriptyline Laroxyl®, Elavil®
Mécanismes d’action des différentes molécules
Le mécanisme d’action est inconnu bien que le point commun entre ces trois médicaments soit une affinité importante pour les récepteurs 5HT2 de la sérotonine. Le pizotifène et l'oxétorone présentent en plus des propriétés anti-histaminiques. Le pizotifène est faiblement anticholinergique. L'oxétorone est également antagoniste dopaminergique.
Effets utiles en clinique
- Traitement de fond de la migraine : l’amitriptyline et l’oxétorone sont considérés comme des médicaments de première intention dans le traitement de fond de la migraine alors que le pizotifène est considéré comme un médicament de deuxième intention. Le traitement par pizotifène doit être instauré à dose progressivement croissante sur 1 semaine. Les posologies d’amitriptyline efficaces dans le traitement de fond de la migraine restent faibles par comparaison aux doses efficaces dans le traitement de la dépression ou des douleurs neuropathiques.
Quel qu'il soit, le traitement doit être réévalué au bout de 3 à 6 mois, il est jugé efficace si le nombre de crises diminue d'au moins 50%. Il faudra également tenir compte de la diminution de conommation des traitements de la crise.
- Prise en charge des céphalées chroniques quotidiennes (CCQ) avec abus médicamenteux: l’amitriptyline IV ou per os peut être proposée dans l'accompagnement pharmacologique du sevrage bien que seuls des essais sur de petites séries de patients soient disponibles. L’amitriptyline s’utilise dans ce contexte en association à la mise en place d’une psychothérapie de soutien ou cognitivo-comportementale.
- Autres : l’amitriptyline possède des effets antidépresseurs et antalgiques (douleurs neuropathiques) qui semblent sans relation avec son effet sur la fréquence des crises migraineuses.
Caractéristiques pharmacocinétiques utiles en clinique
Amitryptine : voir chapitre antidépresseurs.
Pizotifène (voir tableau 5): la résorption du produit par voie orale est presque complète. Le pizotifène se lie fortement aux protéines plasmatiques mais aucune interaction à ce niveau n’a été décrite. La demi-vie d’élimination est longue permettant une seule prise quotidienne.
Biodisponibilité |
½ vie |
Interactions cinétiques |
Pour en savoir plus |
|
Dérivés ergotés |
Faible (formes orales et parentérales) |
Faible (formes orales et parentérales) |
Inhibiteurs CYP3A4) |
Cf tableau 10 |
Agonistes 5HT1B/D |
Variable (formes orales et parentérales) |
Courte (risque de récidive de la crise) |
IMAO, CYP450 |
Cf tableau 13 |
b-bloquants |
Effet de premier passage |
3 heures (il existe des formes LP) |
Fluvoxamine, cimétidine, lidocaïne, topiques digestifs, inducteurs enzymatiques |
Cf b-bloquants |
Pizotifène |
Elevée |
23 heures |
|
1 prise/ jour le soir |
Oxétorone |
très faible (10%) |
24h |
|
1 prise/jour le soir |
Flunarizine |
Elevée 80% |
5 à 15h |
métabolisée par le Cyp2D6 |
équilibre pharmacocinétique atteint en 8 semaines |
Valproate de Na |
Elevée |
15-17 heures |
Autres antiépileptiques |
Cf antiépileptiques |
Gabapentine |
Elevée |
5-7 heures |
Antiacides |
Cf antiépileptiques |
Topiramate |
Elevée |
21 heures |
Autres antiépileptiques, contraceptifs oraux |
Cf antiépileptiques |
Source de la variabilité de la réponse
Totalement imprévisible, la réponse à ces médicaments dépend essentiellement de l’observance (la plupart des échecs des traitements de fond seraient à mettre sur le compte d’une mauvaise observance) elle-même reliée à la survenue des effets indésirables.
Une introduction progressive permet souvent de limiter les effets indésirables et donc d’améliorer l’observance. Les effets des médicaments du traitement de fond nécessitent plusieurs semaines de traitement bien suivi avant de devenir notables. L’appréciation du patient sur les effets est souvent subjective d’où l’importance de la fixation d’objectif lors de la prescription et de la vérification de l’effet par l’analyse d’un agenda des migraines rigoureusement renseigné.
Situations à risque ou déconseillées
En raison de leur structure tricyclique, ces médicaments se comportent comme des antagonistes des récepteurs muscariniques et ne doivent donc pas être utilisés chez des patients souffrant de glaucome par fermeture de l’angle ou d’adénome prostatique (risque de rétention aiguë d’urine).
Les contre-indications propres à l’amitriptyline pourront être consultées au chapitre Antidépresseurs.
Précautions d’emploi
Alcool et dépresseurs du système nerveux central (benzodiazépines, hypnotiques, opiacés…):majoration des effets sédatifs des médicaments du groupe des "antisérotonines" (effets antihistaminique).
Autres atropiniques (antiparkinsoniens atropiniques, antispasmodiques, disopyramide, neuroleptiques…) en raison de la propriété anticholinergique commune au pizotifène et à l’amitriptyline.
Effets indésirables
Effets atropiniques (effets indésirables communs) : xérostomie, constipation, dysurie, élévation de la pression intra-oculaire, troubles mnésiques…
Effets antihistaminiques (effets indésirables communs) : sédation (administration vespérale) et prise de poids
Oxétorone : diarrhée profuse (effet indésirable rare).
Amitriptyline : voir chapitre Antidépresseurs.
Surveillance des effets
- L’efficacité du traitement doit être périodiquement réévaluée. En l’absence de réponse au bout de 8 semaines, le traitement devra être interrompu.
- Sur le plan clinique, la surveillance comprendra essentiellement la recherche de signes témoignant d’un blocage des récepteurs muscariniques, d’une sédation gênante et le contrôle du poids.